La visite à Brooklyn – Alice McDermott

At Weddings and Wakes, 1992. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Marie-Odile Fortier-Masek. Éditions La Table Ronde, Quai Voltaire, 2006 ; réédition au Petit Quai Voltaire, le 7 mars 2019 ; 250 p.

Ma chronique :

Au coeur de ce beau roman, il y a une famille d’immigrés irlandais, trois générations, un appartement à Brooklyn.

Début des années soixante, « Deux fois par semaine en été, […] leur mère fermait la porte d’entrée » de leur petite maison de Long Island, pour partir en visite à Brooklyn, dans l’appartement où elle a grandi et où vivent encore ses trois sœurs célibataires, May, Agnès et Veronica, avec leur tante qu’elles appellent Momma, qui les a élevées toutes les quatre à la mort de leur mère. La douce May, l’impérieuse Agnes, la malchanceuse Veronica, et puis Momma, qui règne sur cet appartement hanté par les absents. Ce roman nous est conté au prisme des souvenirs des trois enfants de Lucy, la quatrième sœur. A mesure de l’histoire, on saura leurs prénoms : Maryanne, Bobby, Margaret, mais souvent, ils seront juste « Les enfants ». A mesure de l’histoire, on découvrira les drames et les chagrins, les histoires de chacun.

La visite à Brooklyn est un roman lent, à la construction vraiment très habile. Alice McDermott déroule une année, l’été et les visites à Brooklyn, les deux semaines fin juillet et début août où leur père loue un cottage de l’autre côté de Long Island – « certaines années, il appréciait l’opulence et l’élégance de la côte sud, d’autres années, l’intimité de la côte nord ». Puis la rentrée en septembre, l’automne à Brooklyn, l’hiver, Noël, jusqu’à un autre été. Mais cette année racontée n’est pas linéaire. Un seul après-midi chez Momma devient une métaphore de tous les après-midi passés là-bas ; quelques jours dans le cottage deviennent toutes les vacances vécues, et ainsi de suite. Tout, sauf le mariage de May, et ce qui arrivera quelques jours plus tard ; des événements à part, qui marquent un avant et un après, dans la vie des enfants.

La prose d’Alice McDermott est riche et pleine de souplesse, l’étude des personnages très fine, et la perception des enfants apporte une grande proximité visuelle à l’ensemble. Cette histoire est imprégnée de chagrin et de déceptions, et pourtant elle raconte avec une certaine fraicheur toute une époque révolue. J’ai vraiment beaucoup aimé. Ah ! Et l’objet livre est d’une élégance et d’une qualité à saluer. Quel plaisir de lecture, ces Petit Quai Voltaire ! Merci aux Éditions La Table Ronde.

« Des êtres dotés d’une durée de vie d’une ou deux secondes, pas plus, le temps qu’ils passent en voiture, c’était tout. »

★★★★★★★★☆☆

NB : Je ne me lasse décidément pas d’Alice McDermott. Tous ses romans que j’ai lus se passent à Brooklyn, mais ils ont chacun leur propre ton et leur charme particulier. Quel bonheur ! Sont chroniqués sur ce blog Someone, Charming Billy et La neuvième Heure (coup de coeur pour ce Prix Fémina étranger 2018)

  11 comments for “La visite à Brooklyn – Alice McDermott

  1. 12 mars 2019 à 20 h 38 min

    Merci Hélène, je le note….

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  2. 13 mars 2019 à 8 h 17 min

    Je me rends compte que je n’ai toujours pas lu cette auteure… ce n’est pas faute de l’avoir notée pourtant !

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  3. 13 mars 2019 à 14 h 51 min

    je note aussi ! je n’ai encore lu aucun livre de cette auteure, j’ai noté aussi « La neuvième heure »

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    • 15 mars 2019 à 13 h 37 min

      La neuvième Heure a été un coup de coeur ! Je te le conseille vivement 🙂

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  4. 13 mars 2019 à 15 h 23 min

    Je viens de la découvrir avec « Someone » que j’ai adoré. Je note le titre dont tu viens de parler.

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  5. 13 mars 2019 à 21 h 26 min

    Je n’ai encore jamais eu la chance de lire Alice McDermott. Toujours un plaisir de te lire Hélène, Bises bretonnes 🙂

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