West – Carys Davies

West, 2018. Traduit de l’anglais par David Fauquemberg. Éditions du Seuil, janvier 2019 ; 192 p.

Ma chronique (rentrée hiver 2019, 5) :

Imaginez. Début du dix-neuvième siècle. John Cyrus Bellman, un colosse roux, a traversé l’Atlantique avec sa femme Elsie et sa sœur Julie. Ils viennent d’Angleterre et s’installent en Pennsylvanie. Déjà, « ce picotement de tout son être, [un] vertige ; un désir de ce qu’il n’avait pas vu, de ce qu’il ne connaissait pas ». Deux ans après la naissance de leur fille Bess, Elsie s’éteint. Cyrus ne s’en remet pas. Huit ans à déprimer, dans les limbes de son élevage de mules. Jusqu’à cet article de journal, un jour, qui évoque des squelettes géants découverts dans le Kentucky. « Dans son esprit ils ressemblaient à une église en ruine, ou une épave de pierre ». Des os monstrueux, de prodigieuses défenses. « Et si, peut-être, de tels monstres foulaient encore la terre, dans les territoires inexplorés de l’ouest ? »

C’est décidé, il va partir à leur recherche. Il confiera Bess aux bons soins de sa soeur « Il faut que j’y aille. Il faut que j’aille voir. C’est tout ce que je peux te dire. Il le faut. Je ne sais pas quoi dire d’autre ». Cela ramène sa vie à un monde où les mystères existeraient encore. « Les bêtes colossales flottaient dans son esprit, semblables à ces nuages aux formes évocatrices qu’il apercevait lorsque, debout dans le paddock derrière la maison, il levait la tête vers le ciel ». Pour préparer son voyage, il consulte à la bibliothèque les livres sur l’expédition de Lewis et Clark, qui ont traversé les Etats-Unis jusqu’à la côte Pacifique entre 1804 et 1806, une dizaine d’années avant lui. Nulle mention de ces animaux fantastiques, qu’importe. Lui les trouvera.

Il part pour au moins deux ans. Mille trois-cent kilomètres jusqu’à Saint-Louis, puis il suivra le fleuve Missouri vers l’ouest jusqu’aux Rocheuses, avec des détours dans les terres vers le Nord. Un jeune indien Shawnee, disgracieux et malingre, l’accompagne, qui se nomme Vielle Femme de Loin.

Les chapitres du roman alternent entre père et fille, Cyrus et Bess, l’un explore, l’autre attend en imaginant le chemin parcouru de l’autre. Le temps passe, mais les démons rôdent parfois où on ne les attend pas.

West prend très vite des allures de conte, et réussit à nous emporter vers l’ouest par des chemins que nul n’avait encore emprunté. En ce sens, l’exploit de la galloise Carys Davies est à saluer. L’ensemble possède un très grand charme. Mais je l’avoue, je suis restée sur ma faim. Tout ceci est un peu poussif, plat, prévisible, peut-être. Et pourtant, je ne voudrais pas me montrer trop incisive envers ce roman, car il se lit vraiment très bien, et l’histoire est belle. A découvrir ?

« Bellman aimait cette histoire, qui lui redonnait de la force – cette idée que, quelle que soit la vision qu’on avait d’un monde connu, il existait toujours des choses en dehors de celui-ci, dont on n’avait jamais rêvé. »

★★★★★★★☆☆☆

  10 comments for “West – Carys Davies

  1. 3 mars 2019 à 18 h 02 min

    Déjà noté, je pense l’emprunter en bibliothèque pour me faire mon avis. J’espère aimer plus que toi.

    Aimé par 2 personnes

    • 4 mars 2019 à 11 h 10 min

      Je l’espère aussi ! Il n’a pas bien fonctionné avec moi, j’espère qu’avec toi si. Je devais en attendre « trop » ou en tous cas autre chose 🙂

      J’aime

  2. 3 mars 2019 à 18 h 13 min

    Ta critique donne envie même si je ne te sens pas pleinement convaincu. Je connaissais ce livre car j’avais lu aussi la critique de Télérama. Je suis très tenté, merci Hélène 😉 🙂

    Aimé par 1 personne

    • 4 mars 2019 à 11 h 13 min

      Même si je n’ai pas été pleinement convaincue comme tu le dis à raison, si tu es tenté par cette histoire originale, fonce 🙂 Bonne semaine à toi Frédéric, bises

      Aimé par 2 personnes

  3. 5 mars 2019 à 15 h 05 min

    Ce livre me fait penser à celui d’ « Eowyn Ivey : Au bord de la terre glacée » dans le style de narration. ( récit à deux voix )….. Merci Hélène

    Aimé par 1 personne

  4. 11 mars 2019 à 12 h 36 min

    Je me suis laissée prendre à cette lecture. Peut-être aussi parce que je ne savais pas trop ce que j’allais lire, une lecture choisie par curiosité. Et puis, j’ai bien aimé cet aspect fable.

    Aimé par 1 personne

    • 15 mars 2019 à 13 h 43 min

      Tant mieux, je suis heureuse que ce roman plaise, j’étais tellement déçue d’être passée un peu à côté !

      J’aime

Laisser un commentaire