Douze auteurs jeunesse irlandais #2 : Siobhan Dowd

L’an dernier, je vous ai proposé des billets sur des auteurs irlandais lus il y a longtemps : mes Mémoires de Porcelaine. Cette année, c’est à un petit tour d’horizon de la littérature jeunesse irlandaise traduite en français que je vous convie, pour vous présenter douze auteurs, qui écrivent ou non exclusivement pour la jeunesse. Une roue à douze rayons, un trèfle à douze feuilles, douze romans – et même plus – que j’ai déjà lus (sauf pour trois d’entre eux, qui sont encore dans ma Pile à Lire et dont j’ai prévu la lecture dans les mois à venir).


Mon deuxième billet de cette série portera sur Siobhan Dowd.

Née en 1960 à Londres de parents irlandais, Siobhan Dowd est diplômée de l’université d’Oxford. Elle a dirigé à New York le PEN, une fondation d’écrivains qui œuvre dans le monde pour la liberté d’écrire. Dans ce cadre, elle s’est rendue en Indonésie et au Guatemala, pour enquêter sur l’application des droits de l’homme pour les écrivains. De retour en Angleterre, elle fait partie du comité des écrivains en prison (Writers in Prison Committee) et devient sous-commissaire pour les droits de l’enfant dans le comté de l’Oxfordshire. Elle a écrit des nouvelles et des articles, avant de publier Sans un cri, son premier roman pour la jeunesse, qui a recueilli les honneurs de la critique et a permis à son auteur d’être élue parmi les vingt-cinq « auteurs du futur » par The Guardian.
En août 2007, à 47 ans, Siobhan Dowd décède hélas subitement d’un cancer du sein. Ses quatre romans pour la jeunesse constituent « une œuvre littéraire magistrale d’autant plus précieuse qu’elle fut interrompue au summum de son accomplissement. Elle témoigne de son immense talent d’écrivain, de sa profonde passion pour la vie et de l’attachement qu’elle a toujours gardé pour l’Irlande où elle se rendait régulièrement » (présentation de l’éditeur)

D’elle, j’ai pour le moment lu un roman, La Parole de Fergus, et ce fut un très gros coup de coeur !

Sans un cri (A Swift Pure Cry, 2006)

Traduit de l’anglais par Cécile Dutheil de la Rochère. Éditions Gallimard Jeunesse, « Scripto », 2007

« Dans le petit village irlandais de Coolbar, Shell tente d’être une lycéenne comme les autres. Mais élever Trix et Jimmy, ses petits frère et sœur, tout en les protégeant d’un père alcoolique et violent, n’est pas un quotidien ordinaire pour une jeune fille de quinze ans. Pourtant, Shell ressent profondément la joie d’exister. D’où lui vient cette force incroyable qui la sauve, même quand l’Irlande entière la montre du doigt ? Un roman singulier et fort, touché par la grâce. Comparée aux plus grands écrivains irlandais, Siobhan Dowd signe une histoire poignante, tirée de faits divers réels. » (Présentation de l’éditeur)

L’Étonnante disparition de mon cousin Salim (The London Eye Mystery, 2007)

Traduit de l’anglais par Catherine Gibert, Éditions Gallimard Jeunesse, 2009

« Ma sœur et moi avons emmené notre cousin Salim à la grande roue de Londres parce qu’il n’y était jamais allé. Lundi 24 mai, 11 h 32, nous avons regardé Salim monter dans une nacelle. Lundi 24 mai, 12 h 02, la nacelle est redescendue, les portes se sont ouvertes, tous les gens en sont sortis. Sauf Salim, qui s’est volatilisé. La police ne sait pas où donner de la tête. A-t-il été enlevé comme le pense tante Gloria ? Moi, Ted, j’ai échafaudé neuf théories, dont celle de la combustion spontanée, et je vais toutes les vérifier. » (Présentation de l’éditeur)

La Parole de Fergus (Bog Child, posth., 2008)

Ttraduit de l’anglais par Cécile Dutheil de la Rochère. Éditions Gallimard Jeunesse, « Scripto », 2009

Ma chronique : Nous sommes en 1981. Fergus à 18 ans. Il court beaucoup, révise pour son examen d’entrée à l’université – trois B et il sera pris en Médecine, c’est le métier qu’il veut exercer depuis toujours – , il prend des leçons de conduite accompagnée avec son oncle Tally. Fergus a deux petites sœurs qu’il emmène parfois à la piscine, il aide sa mère quand elle en a besoin. Par hasard, il vient de découvrir un corps inhumé dans la tourbière, plus haut dans la montagne, parfaitement conservé, certainement une fillette ayant vécu à l’âge du fer… et la fille de l’archéologue chargée du dossier est séduisante en diable.

Fergus est un jeune homme bien, comme les autres, peut-être juste plus chouette que beaucoup. Il pourrait avoir une vie des plus classiques… Sauf qu’il vit en Irlande du Nord, non loin de la frontière avec la République d’Irlande, pendant les Troubles.

Son frère aîné Joe est emprisonné à Long Kesh, et entame une grève de la faim. Bobby Sands vient d’en mourir, après 66 jours sans se nourrir. Le gouvernement Britannique leur refuse le statut de prisonniers politiques (ils sont traités comme des prisonniers de droit commun), Margaret Thatcher, la Dame de Fer, ne cède jamais. Le circuit de jogging de Fergus, tôt le matin, l’amène à passer le poste frontière et il sympathise (en cachette, car cela pourrait lui coûter cher) avec le jeune gallois Owain, soldat de l’armée Britannique en faction. L’IRA provisoire l’approche habilement et sollicite son aide comme « passeur »… la retransmission télévisuelle du match de foot du vendredi soir est coupée par un flash annonçant un nouvel attentat à la bombe. 

L’amour, la fraternité, trouver sa place, se réaliser… Comment vivre une vie normale quand le destin d’une nation brûle autour de soi ?

Tout au long du récit, par petites touches délicates et sensibles, les rêves de Fergus portent jusqu’à nous la voix de Mel, l’enfant de la tourbe. Sa vie, sa famille, ses affections, ses tourments, l’approche de sa mort (Assassinat ? Sacrifice ? ). Ces passages forment un contrepoint mélodieux au présent de Fergus, et en sont souvent étrangement proches.

Siobhan Dowd réussit dans « La Parole de Fergus » à aborder des sujets douloureux sans jamais tomber dans un pathos réducteur, et à alterner gravité et légèreté sans aucune frivolité. Certains retournements de situation sont délicieux ; d’autres hélas, terribles. Ce roman est un plaisir rare de bout en bout, un vrai coup de cœur.

Où vas-tu, Sunshine ? (Solace of the Road, posth., 2009)

Traduit de l’anglais par Bee Formentelli. Éditions Gallimard Jeunesse, « Scripto », 2010

« Holly n’en peut plus des éducateurs sociaux, des familles d’acceuil, de leur gentillesse et de leurs bonnes intentions. Chez les Aldridge, elle déniche dans le tiroir d’une commode une perruque blonde très glamour et c’est le déclic. Elle devient Sunshine, jeune fille sensuelle et rayonnante, et prend la route vers l’Irlande, à la recherche de sa mère… » (Présentation de l’éditeur)

Le prochain rendez-vous de Douze auteurs jeunesse irlandais se fera avec John Boyne 🙂

  14 comments for “Douze auteurs jeunesse irlandais #2 : Siobhan Dowd

  1. 11 juin 2017 à 13 h 01 min

    Depuis que j’ai lu A Monster Calls, j’ai très envie de découvrir cette auteure 🙂 Merci pour le rappel du coup, et je profite de noter les titres !

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    • 11 juin 2017 à 15 h 34 min

      Ah oui c’est vrai, le roman de Patrick Ness, d’après une idée originale de Siobhan Dowd. « Quelques minutes après Minuit », en français, si je ne m’abuse ?
      *se dit qu’il faudrait le rajouter à la fiche, du coup*
      Le film est très bien aussi, je crois ! Damned j’ai du pain sur la planche 🙂
      Merci pour le rappel ^^

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      • 11 juin 2017 à 17 h 23 min

        Exact ! Je l’ai vraiment aimé (pas encore vu le film, je retarde ce moment vu que je sais déjà que je vais pleurer toutes les larmes de mon corps haha) et du coup j’ai bien envie de découvrir d’autres livres de Siobhan et de Ness pour voir le talent de l’un et de l’autre 🙂

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  2. 11 juin 2017 à 14 h 23 min

    Comme Maned Wolf, c’est grâce à A monster calls que j’ai découvert son nom. Maintenant, il ne me reste qu’à lire les romans qu’elle a pu écrire !

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    • 11 juin 2017 à 15 h 36 min

      Et moi il ne me reste plus qu’à mettre la fiche à jour et à lire/voir ce « Quelques minutes après minuit » ! ^^ Merci 😀

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      • 12 juin 2017 à 5 h 20 min

        Pour Quelques minutes après minuit, elle a eu l’idée, mais elle n’a pas eu le temps de l’écrire donc c’est Patrick Ness qui a (brillamment) pris le relais. Mais je pense qu’il faut quand même accordé un peu du mérite de cet extraordinaire roman à Siobhan Dowd.

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      • 12 juin 2017 à 8 h 57 min

        Absolument ! Je vais mettre mon billet à jour 🙂

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  3. 16 juin 2017 à 16 h 27 min

    le roman de Patrick Ness, d’après une idée originale de Siobhan Dowd. « Quelques minutes après Minuit  » je l’ai adoré ! cela donne envie de se plonger dans l’œuvre de cette auteure parti trop tôt et qui ne manquait pas de talent. Bon weekend à toi 😉 🙂 Bises.

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    • 17 juin 2017 à 9 h 08 min

      Décidément il faut que je le voie/lise ! A bientôt Frédéric, et bon week-end, bises 🙂

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      • 17 juin 2017 à 15 h 09 min

        c’est une petite perle cet ouvrage vraiment ! que d’émotions ! Bises bretonnes pour toi 🙂 🙂

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